BĠĠh
Image et Ressemblance Dieu
dans la cration et les naissances humaines
Monique Lise Cohen
Docteure s lettres
Nous lisons en Gense (1, 26) : Ç Dieu dit : faisons lĠhomme dans notre image et comme notre ressemblance È, et plus loin nous lisons quĠAdam engendra [Seth] Ç dans sa ressemblance et comme son image È (Gense 5, 3).
En Gense 1, 27 nous lisons que Dieu cra lĠhomme Ç dans son image È, et le verset explicite : Ç masculin È et Ç fminin È. Que sont le masculin et le fminin, sceau du Crateur et de la cration ? Que sont Ç lĠimage È et Ç la ressemblance È Dieu qui se poursuivent dans les naissances humaines ? Si le concept dĠhistoire se dit en hbreu Ç toledot È, cĠest--dire engendrements, pouvons-nous penser que la cration est ainsi transfigure par ce qui se joue au plus profond de la chair ? Ou encore appellerions-nous du nom du Ç visage È cette transfiguration, comme dans lĠÏuvre dĠEmmanuel Lvinas ?
Nous lisons encore que lĠhomme abandonne son pre et sa mre ; il sĠunit sa femme, et ils deviennent une seule chair (Gn 2, 24). Selon lĠillustre commentateur mdival, Rachi, une seule chair cĠest lĠenfant [1]. Il est encore crit : Ç Ceci est le livre de la postrit (des engendrements / toledot) dĠAdam - Le jour o Dieu cra Adam, il le fit la ressemblance de Dieu. Il les cra masculin et fminin, les bnit et les appela Adam, le jour de leur cration. Adam ayant vcu 130 ans, engendra un tre dans sa ressemblance et comme son image, et lui donna pour nom Seth (Gn 5, 1-3). È
Ainsi lĠimage et la ressemblance Dieu se poursuivent dans les naissances humaines. Quel en est le sens pour notre vie ?
Ouverture sur la filiation : le rcit biblique
Abraham et Sarah
Sarah tait strile, elle nĠavait point dĠenfant (Gn 11, 30). Plus loin nous lisons que Sarah dit Abraham : Ç Approche-toi de mon esclave (Gn 16, 2) È. De ce lien natra Ismal. LĠappel Agar est suivi de son renvoi. Cette injustice sera rpare plus tard par Isaac, quand il favorisera le mariage entre Ketoura (le nouveau nom dĠAgar dans la tradition juive) avec Abraham [2].
Nous apprenons de ces textes, que la Bible conoit lĠexistence de mres porteuses. Situation qui se retrouvera dans le rcit des prgrinations de Jacob. Ses pouses, Rachel et La, ont des servantes qui jouent galement ce rle.
Nous savons aussi par le rcit biblique que les pouses striles sont les plus aimes. CĠest le cas de Sarah, Rebecca, Rachel et Hannah. Comme si, trs trangement, la strilit tait le secret de la fcondit. Pourtant des textes disent quĠtre sans enfant est comme tre aveugle, lpreux, pauvre, etc. [3] Quel est le sens de ce paradoxe ?
Revenons au dbut du rcit, lĠhistoire de la naissance dĠIsaac, fils dĠAbraham et de Sarah. La fcondit adviendra plus tard, elle ne sera possible quĠaprs le changement de nom lorsque Abram devient Abraham, lorsque Sara devient Sarah, et aprs la circoncision. QuĠest-ce que la circoncision ? CĠest un commandement qui incombe au pre de lĠenfant et qui le constitue comme pre. Ainsi le pre est pre par la circoncision de son fils. Une telle paternit nĠest ni spirituelle, ni biologique. Benny Lvy, dans un de ses enseignements, disait que la circoncision du fils constitue le pre comme pre adoptif. Rappelons que la circoncision est la sortie du cycle naturel, et selon Dominique Aubier, lĠintroduction du modle Ç roch È (crbral) dans la sexualit.
Le nazisme tait contre la circoncision et la conscience. Jean Dujardin cite Hermann Rauschning : Hitler disait : Ç Les Tables du Sina ont perdu toute validit. La conscience est une invention des Juifs. Elle est lĠquivalent dĠune circoncision, dĠune amputation de lĠtre humain È [4]. La tradition juive considre que le pire ennemi dĠIsral, porte le nom dĠAmaleq qui est prsent dans le Bible comme lĠennemi de la circoncision.
Des tudes cabalistiques mettent en valeur la correction spirituelle que viendrait tablir la pratique de la circoncision. Il sĠagit dĠun livre remarquable de Dominique Aubier, Rponse Hitler ou/et la Mission juive : la circoncision [5]. Elle explique que le nazisme prne un dveloppement purement naturel du corps humain alors que la circoncision introduit un modle Çroch È, cĠest--dire Ç crbral È ou spirituel dans la sexualit. Cela se manifeste dans un changement de lĠordre des sefirot dans le schma de lĠArbre de vie de la cabale. Ce changement apparat comme un bouleversement dans la configuration du corps humain dĠun ordre naturel, et ceci en vue de lĠintroduction de ce modle crbral dans la sexualit [6].
Quel est le sens maintenant du changement de Nom ? Abram et Sara vont hriter des deux lettres H du Nom divin Ttragramme et sĠappeler Abraham et Sarah (Gn 17, 5 et 15).
Catherine Chalier dit que cĠest une dimension fminine dont ils hritent. En effet, le Nom Ttragramme, YHWH, peut se dcliner ainsi : Y-le Pre, H-la Mre, W-le Fils, et H-la Fille. Les deux H sont la mre et la fille, dimensions fminines du Nom divin.
Il y a galement des lettres du Nom Ttragramme dans les mots homme - ich (aleph yod chin) et femme - icha (aleph chin h). Il sĠagit des lettres yod et h qui assembles sont parfois dans la Bible une des critures du Nom divin. Si on les enlve des mots ich et icha, il ne reste chaque fois que aleph-chin, dans chacun des deux mots, ce qui veut dire : le feu. Soit la consumation, dvoration amoureuse, o lĠamour lui-mme sĠabolit. Il faut donc la prsence les lettres du Nom divin, Y et H, pour ne pas tre dvor par le feu.
Les lettres masculines et fminines, YH, du Nom divin protgent lĠamour de sa consumation inutile. Les deux lettres fminines, HH, du Nom divin ouvrent pour le premier couple monothiste de lĠhistoire humaine le chemin de la fcondit.
CĠest la condition du changement de nom quĠAbraham et Sarah pourront avoir un enfant. Pourquoi lĠintroduction de lettres fminines dans les noms permet-elle la fcondit ? CĠest ce que nous aurons explorer sous la figure de la mre. Aprs le changement de nom, Dieu fabrique lĠovaire dont la nature avait priv Sarah [7].
Dirions-nous que les naissances dans le chemin de filiation qui est celui de lĠhistoire de la promesse ne sont pas vritablement des naissances naturelles ? Elles ne sont pas pour autant des naissances spirituelles. Car nous nous situons dans une autre anthropologie que lĠanthropologie grecque [8].
Le rcit biblique nous enseigne que Sarah ne souffre pas en enfantant. Il y a donc l le dpassement de la maldiction dĠEve : Ç JĠaggraverai tes labeurs et ta grossesse ; tu enfanteras avec douleurÉ È (Gn 3, 16). Ceci nous apprend que la maldiction nĠest pas naturelle, que les souffrances de lĠaccouchement ne sont pas une loi de la nature, et que la parole de maldiction ne sĠinscrit pas dfinitivement dans la chair du monde. La maldiction doit tre leve : cĠest ce qui advient avec Sarah.
Grce lĠenfant, malgr leur vieillesse et la mort invitable, Sarah et Abraham apprendront comment le moi se transcende dans le fils, se libre surtout de la finitude dĠun destin [9].
Ouverture sur la filialit selon lĠenseignement dĠEmmanuel Lvinas
Catherine Chalier fait alors remarquer que cĠest toute la doctrine dĠEmmanuel Lvinas sur la filialit que nous retrouvons ici. Le philosophe crit dans thique et Infini que la filialit est une relation avec autrui o autrui est radicalement autre, et o cependant il est, en quelque faon, moi ; le moi du pre qui a affaire une altrit qui est sienne, mais sans tre possession ni proprit [10].
Dans la confrence Ç Au-del du possible È, il dcrit ainsi ce paradoxe : comme si mon tre, dans la fcondit - et partir des possibilits des enfants - dpassait les possibilits inscrites dans la nature dĠun tre.
Cet avenir au-del de mon propre tre, dit-il encore, est la dimension constitutive du temps, et elle prend dans la paternit un contenu concret. Il faut noter cependant que la paternit est plus large que la dimension biologique, et que la filialit biologique nĠest que la figure premire de la filialit. Considrer autrui comme son fils, cĠest prcisment tablir avec lui ces relations que Lvinas appelle : Ç au-del du possible È [11].
Cet Ç au-del du possible È semble entrer en rsonance avec le rcit de la ligature dĠIsaac (Gn 22, 1-19) o nous lisons le commandement donn Abraham dĠoffrir son fils en holocauste, ce qui littralement se lit : Ç fais monter ton fils È. Cette monte du fils qui ne sĠachve pas en sacrifice pourrait-elle se lire comme Ç lĠau-del du possible È dont parle Lvinas ? La paternit, dit le philosophe, nĠest pas simplement un renouvellement du pre dans le fils et sa confusion avec lui, elle est aussi lĠextriorit du pre par rapport au fils, un Ç exister pluraliste È.
La sexualit, la paternit et la mort introduisent dans lĠexistence une dualit qui concerne lĠexister mme de chaque sujet. LĠexister lui-mme devient double. La notion philosophique de lĠtre est dpasse. Le temps constitue non point la forme dchue de lĠtre, mais son vnement mme.
Nous pourrions encore entendre ici le texte de la Gense : Adam (masculin/fminin) cr dans lĠimage de Dieu est bni et reoit le commandement de fructifier et de multiplier (Gn 1, 26). Pourrions-nous comprendre la filiation dans lĠhorizon de cette bndiction au sens o Lvinas parle de la paternit comme Ç exister pluraliste ?
Dans Totalit et Infini, Lvinas dit que Ç par une transcendance totale - la transcendance de la trans-substantiation - le moi est, dans lĠenfant, un autre È, et que Ç La relation avec un tel avenir, irrductible au pouvoir sur les possibles, nous lĠappelons fcondit. È La fcondit, exlique-t-il, Ç indique mon avenir qui nĠest pas un avenir du Mme È [12].
Ç La relation avec lĠenfant - cĠest--dire la relation avec lĠAutre, non pas pouvoir, mais fcondit, met en rapport avec lĠavenir absolu ou le temps infini. È La fcondit du moi nĠest ni cause, ni domination. Je nĠai pas mon enfant, je suis mon enfantÉ la fcondit du moi, cĠest sa transcendance mme [13].
Que dire alors de la maternit ? Catherine Chalier crit que la maternit est lĠinou passage au temps de lĠautre. Elle largit la maternit ce que Lvinas dit de la paternit. CĠest une sortie du prsent. La transcendance dĠun autre au plus intime de soi. Paternit et maternit sont un dpassement de lĠtre-pour-la-mort de Heidegger : Ç De cet inou passage au temps dĠun autre, cet au-del de lĠipsit, en sa chair mme. Comme si, lĠalliance contracte avec Abraham, transmise au fils port et nourri par Sarah, recevant enfin son sens, grce ce dpassement de leur tre-pour-la-mortÉ. È [14].
Les mres dans le rcit biblique et la parole prophtique
Dieu dit Abraham dĠcouter la voix de sa femme (Gn 19, 12), Rachi en conclut ici que la prophtie fminine est suprieure la prophtie masculine. QuĠest-ce que la prophtie ? La prophtie est un geste, une parole qui oriente lĠhistoire, en la faisant sortir de la pesanteur de la fin des temps et de lĠhistoire universelle, vers lĠhistoire des engendrements qui est aussi lĠhistoire de la promesse.
Nous retrouvons cette orientation de lĠhistoire dans la ruse de Rebecca pour quĠIsaac donne sa bndiction Jacob plutt quĠ Esa (Gn 27). Lorsque Tamar, dguise en prostitue, obtient un enfant de Jehouda, son beau-pre, elle sĠinscrit dans lĠhistoire de lĠengendrement du messie (Gn 38). Nous le lisons dans lĠhistoire des femmes des Hbreux en Egypte quand les sages-femmes mettent au monde des enfants malgr la dcision du Pharaon dĠexterminer les enfants mles (Ex 1, 15-22). Mose sera ainsi sauv et il pourra accomplir sa mission. Nous le dcouvrons dans lĠhistoire de Ruth qui est lĠanctre de David, le roi-messie de la tribu de Jehouda (Livre de Ruth). Trs anciennement, lĠhistoire des filles de Lot est celle de ces jeunes filles, qui, croyant lĠhumanit abolie aprs la destruction de Sodome et de Gomorrhe, couchent avec leur pre pour poursuivre le projet humain. Un enfant qui natra de cet inceste sera Moab, anctre de Ruth la Moabite (Gn 19, 31-38). Il y a encore le rcit de Hanna, mre du prophte Samuel qui recevra en charge dĠoindre les rois dĠIsral, Sal et David (1 Samuel 1 et 2).
Nous pouvons tirer une consquence importante sur le rle des femmes dans la Bible : elles orientent lĠhistoire (Ç toledot È / engendrements) dans le sens de la promesse. Nous sortons de lĠhistoire universelle car ce qui est en vue cĠest la naissance du messie. Ainsi la parole prophtique est lie aux engendrements [15].
Or la parole prophtique est elle-mme une dualit : Ç lĠautre dans le mme È, dit Lvinas. Nous lisons dans la grande Ïuvre de Lvinas, Autrement quĠtre : Ç Le prophtisme serait ainsi le psychisme mme de lĠme, lĠAutre dans le Mme, o le dans signifie le rveil du Mme par lĠAutre. Sans que lĠInfini soit prsent ! Il est arrire-pense trop haute pour se pousser au premier rang ou au rang de thme. Dans la phrase premire o Dieu est tmoign - dans le me voici - Dieu nĠest pas nonc [É] LĠobissance qui prcde lĠcoute de lĠautre est anachronisme de lĠinspiration [É] Elle est singulire obissance lĠordre de se rendre avant de lĠentendre. Cette allgeance avant tout serment est lĠAutre dans le Mme, cĠest--dire le temps, le se passer de lĠInfini ! È [16].
Comme Ç lĠhistoire È porte le nom de toledot/engendrements, on va retrouver des histoires semblables avec Rebecca et Isaac, Tamar et Jehouda, les femmes des Hbreux en Egypte, Ruth, et trs anciennement les filles de Lot avec leur pre.
Tous ces engendrements ont en vue la naissance du Messie : le Messie nat. Le messie nĠest pas une ide rgulatrice de la raison, mais il nat, ce qui veut dire quĠil nat dĠune femme quĠil a une mre.
La filiation et lĠau-del de la mort
Au moment de la mort de Sarah, il est crit : Abraham tait vieuxÉ (Gn 24, 1)
Le midrach dit quĠAbraham a apport la vieillesse dans le monde. Pour viter la confusion entre Abraham et Isaac, Abraham Ç pria le ciel de lui accorder la vieillesse È (Trait Sanhdrin 103b) [17].
Le pre nĠest pas le fils : ils ne sont pas dans le mme prsent. La filiation est un passage au temps de lĠautre. Nous retrouvons ici les analyses de Lvinas sur le temps comme diachronie et sa critique du prsent vivant. On est loin du culte fascisant de la jeunesse ternelle et naturelle qui se combine avec la haine des nazis lĠencontre de la circoncision.
Ce passage au temps de lĠautre par la filiation nous fait sortir des apories heideggriennes de lĠtre-pour-la-mort.
En quel sens la mort est-elle ainsi surmonte ?
La mort apparat ds le dbut du texte biblique, dans les premiers chapitres de la Gense. Le midrash rapporte que la terre, tout dĠabord, commit une faute au troisime jour de la cration. Elle avait reu le commandement de produire des Ç arbres-fruits È, cĠest--dire des arbres qui soient eux-mmes des fruits, mais probablement, par peur dĠtre ainsi dvore, elle produisit des arbres qui allaient produire des fruits, introduisant ainsi dans le monde la succession des naissances et des morts (Gn 1, 11-12)
Enfin le premier commandement donn Adam, et concernant la nourriture, se termine par cette recommandation : Ç Sinon mourant tu mourras ! (Gn 2, 15-17) È. Nous lisons que la mort advient aprs une faute, mais quĠil y a tout de suite rparation : éve porte ce nom parce quĠelle est la mre de tous les vivants.
Il est question de la sortie du temps de soi (pur prsent) vers le temps de lĠautre dans plusieurs situations : la relation entre lĠhomme et la femme, la fraternit, la filiation et la mort. Notons que Lvinas parle de deux faons de la mort : comme responsabilit pour la mort dĠautrui et passage au temps de lĠautre. Nous entendons encore lĠlment de la rparation qui nous sort du discours tragique o la mort est lĠultime de lĠhumain, dans le mot Ç vie È qui, en hbreu, se dit au pluriel Ç ham È, et que lĠon entend dans le titre du texte biblique qui fait suite la mort de Sarah : Ç hayy Sarah È, Ç les vies de Sarah È (Gn 23, 1 - 25, 18).
La mre, lĠnigme de la strilit, et la naissance du messie
Comme Abraham, Rebecca va quitter son lieu natal. CĠest en fait le premier mariage juif. Un engagement de lĠamour dans le sens du don et de son accueil, dit Catherine Chalier. La dualit de lĠhomme et de la femme est en fait insurmontable, il nĠy a pas de communion ou de fusion. Lorsque le texte dit que lĠhomme et la femme deviennent Ç une seule chair È, Rachi dit : Ç une seule chair, cĠest lĠenfant È (Gn 3, 24). Emmanuel Lvinas parle ainsi, dans Le temps et lĠautre, dĠune mise en relation avec ce qui se drobe jamais.
La Bible nous apprend briser les liens de la naturalit, car la naissance du messie nĠest pas naturelle. Et ce lien dĠhistoire en vue de la naissance du messie sĠappelle Ç toledot È/ engendrements.
Nous lisons en hbreu que la mre enfante (yld), que le pre engendre (yld au hiphil). Toledot est construit sur un hiphil, cĠest--dire la forme factitive du verbe. Cela ne signifie pas cependant que la mre est un rceptacle matriel et passif pour recevoir la semence masculine. Car ce sont les femmes qui vont orienter lĠhistoire, les gnrations, vers la naissance du messie.
Les couples de lĠAlliance, explique C.Chalier, portent ttons un projet qui les dpasse. Or Rebecca, comme Sarah, tait strile. Tous deux vont prier. La prire dĠIsaac sera entendue (Gn 25, 21-24). Rebecca, comme Sarah, sera galement gratifie de lĠovaire qui lui manquait. Sarah avait tait heureuse de sa maternit ; ce nĠest pas le cas de Rebecca, car les enfants Ç se heurtaient dans son sein È. Elle va interroger alors non pas son mari ou son beau-pre, ni dĠautres femmes, car elle sent prophtiquement que quelque chose dĠinou se passe en elle. Elle interroge lĠAcadmie de Sem et Eber, non pas sur les enfants, mais sur elle-mme : Ç Ë quoi suis- je destine ? È demande-t-elle. CĠest Dieu qui lui annonce lĠenjeu de ce combat : deux nations sont en elle ! Elle comprend alors quĠelle devra sparer les enfants. Les femmes vont orienter lĠhistoire dans le sens de la promesse, et Rebecca utilisera une ruse pour quĠIsaac donne la bndiction Jacob plutt quĠ Esa (Gn 27).
Si les femmes orientent prophtiquement lĠhistoire dans le sens de la promesse, leur maternit ne peut se rduire la dimension de rceptacle de la semence masculine ou de terre fertile apte la reproduction. Nous demandons alors : quĠest-ce quĠavoir une mre ? Traditionnellement, Rachel, la femme aime de Jacob, est considre comme notre mre.
Lorsque Jacob rencontre Rachel, lĠamour est immdiat, puis il y a attente, cause de la strilit. La, la premire pouse de Jacob, est la mal-aime, mais Dieu lui donne plusieurs enfants. Mais ne dit-on pas cependant que ce que Rachel a eu par sa joie, La lĠa eu par ses larmes ? De retour vers la terre de la promesse, Rachel va mourir prmaturment, Ç sur le chemin È. Le Zohar demande : Ç Quand le Messie viendra, o marchera-t-il ? Dans un chemin (Dt 22, 6), ce qui est une allusion au tombeau de Rachel qui se trouve la bifurcation des chemins È. Le Messie Ç ira la consoler. Elle ne voulut pas recevoir la consolation du Saint Beni soit-Il, mais elle recevra les consolations du messie, elle se lvera, et elle lĠembrassera. La lumire se rpandra dans le monde È [18].
Selon lĠenseignement du Zohar, Rachel est notre mre. Nous avons ainsi une mre qui nous accompagne de ses pleurs sur le chemin de lĠexil. Catherine Chalier analyse la mort prmature de Rachel comme le sens mme du messianisme, et dans les termes de Lvinas, la responsabilit pour autrui. Rachel, notre mre, nous transmet lĠattente messianique. Si toute attente est attente du Messie, nous retrouvons le sens du temps comme passage au temps de lĠautre dont la figure premire est celle de la maternit.
Est-ce le sens de la matricialit dont est porteur le Nom divin Ttragrammatique ?
Rachel est comme la Chekhina, la Ç prsence de Dieu È qui accompagne les exils. La Chekhina est la vraie Rachel, attendant lĠinou de la consolation messianique. Car un des noms du Messie est Menahem, le consolateur [19].
Ainsi le Messie doit natre, et il doit natre dĠune femme. Si Rachel est notre mre, nous sommes des frres qui ont une mre. QuĠest-ce quĠavoir une mre ?
Cette problmatique est dveloppe par Benny Lvy, dj dans son dialogue avec Jean-Paul Sartre, comme sortie des impasses rvolutionnaires. Ils se demandaient comment penser la fraternit sans la terreur. Cela nous renvoie la Mre : Ç CĠtait le problme de Sartre la fin de sa vie. Il tait conscient du fait que la fraternit des insurgs, des membres du groupe en fusion, tait factice. Il cherchait lors des derniers entretiens penser une fraternit Ç authentique È et cela lĠa amen des propositions tranges dans sa bouche, mais suggestives pour nous : la fraternit renvoie la Mre. È [20] CĠest--dire que pour que la fraternit ne sombre pas dans le meurtre du Pre (abolition de la paternit dans la Rvolution franaise, meurtre du pre, excution du roi qui tait le pre de la nation), il faut une mre. Mais cette mre nĠest pas la Ç mre-patrie È, concept androgyne issu de la Rvolution, concept o sĠabolit la diffrence sexuelle puisquĠil comprend ensemble et semble fusionner les mots de mre et de pre.
Comment penser le masculin et le fminin qui sont lĠimage de Dieu, comment penser la maternit et la paternit en Dieu ?
La paternit et la question du monothisme : hritage juif et chrtien
Le deuxime sens de lĠuniversel est messianique, crit Gilles Hanus, car si la communaut humaine est fraternelle, elle implique la communaut de pre [21].
Nous avons un mme pre : telle est la dimension du monothisme. Le Pre Bernard Dupuy nous invite cette approche. Retrouver Dieu comme pre, crit-il, tel est lĠenjeu du christianisme. Le nom de Pre, dit-il encore est celui que les chrtiens se risquent partager avec les juifs. Il crit ainsi : Ç La rencontre dĠAbraham et de Meschisedeq [É] elle trouve son expression dans la locution du Dt 4, 35 : Ha-shem hou ha lohim : le Dieu de la Torah est le Dieu du monde ; le Dieu de la rvlation est le Dieu crateur du ciel et de la terre, le Dieu dĠAbraham est le Dieu de Melchisedeq. Cette identification est possible [É] ds lors que le Dieu de la Torah est invoqu non comme le Ç premier tre È, mais comme Ç Pre È. Ce nom de Ç pre È est le plus vulnrable des noms [É] CĠest le nom que lĠhistoire (Kant, Hegel, É) efface en gommant le moment fondateur abrahamique. È Le nom de Ç pre È, prcise-t-il, est galement absent du Trait des noms divins du Pseudo-Denys. Ç On pourrait avancer que le Ttragramme est le Nom divin confi Isral et dont il a la garde en particulier et que le nom de Ç Pre qui est dans les cieux È est celui quĠil est invit partager. Et en le partageant, il le risque. Aussi peut-on constater chez les prophtes une rserve trs nette considrer Dieu comme pre : Dieu est bien plutt celui qui cre et qui conduit lĠhistoire. Cependant le judasme pharisien retiendra ce nom en liaison, non avec une vision cosmologique, mais avec la doctrine du royaume des cieux : Ç notre pre qui est dans les cieux È. De ce point de vue, ce nom est devenu spcifique du christianisme [É] le christianisme ne peut invoquer le Pre, qui est le Ç Pre È de Jsus, que parce que le Dieu de Jsus est le Dieu dĠIsralÉ È [22]
LĠhistoire philosophique occidentale est cependant fond sur un refus de la naissance. La pense philosophique privilgie toujours lĠtre-au-monde dans lĠoccultation de la naissance renvoye un simple phnomne biologique. Ainsi lĠOccident ne pense ni la naissance ni la cration, et mettrait la place de la naissance lĠtre-au-monde, la place de la cration lĠternit de la matire, et la place de lĠaltrit, lĠtre-pour-la mort. Il y a l comme une abolition de la transcendance. CĠest ce que constate Lvinas, lorsquĠil enseigne que toute la pense philosophique est un effort dĠabolition de la transcendance. Y verrait-on galement un choix de la mort ? Nous apprenons de Socrate que philosopher cĠest apprendre mourir (Phdon, 63e-69e), thme qui se poursuit chez Cicron lorsquĠil sĠadresse Brutus, et jusquĠ nos jours dans la notion heideggrienne Ç dĠtre-pour-la-mort È.
Mais la Bible nous enseigne : Ç Tu choisiras la vie ! È
La vie dans lĠhorizon de la cration et de la naissance
Il est crit : Ç JĠai mis devant toi la vie et la mort, la bndiction et la maldiction, tu choisiras la vie. (Dt 30, 19) È La Bible parle de la cration, de la naissance et de la rsurrection des morts alors que le thme de lĠimmortalit de lĠme est propre la philosophie depuis son origine. Platon nous enseigne que Ç philosopher cĠest apprendre mourir È, et ainsi la philosophie nous conduit sparer lĠme (immortelle) du corps (prissable) en choisissant le lieu des ides intelligibles contre la matrialit du monde sensible. CĠest lĠacte de naissance de la philosophie au sortir de la mythologie. Il y aurait alors deux vies : celle du corps qui est prissable et sĠefface dans la matire et celle de lĠme qui se lie lĠesprit au moment de la mort du corps, et qui est immortelle. Ces deux faces de la vie se diraient comme dĠune part la vie biologique et dĠautre part la vie spirituelle.
La scne initiale et la naissance de la philosophie
LĠoeuvre de Platon est lĠacte de naissance de la philosophie. Dans les sminaires clandestins quĠil donna en Tchcoslovaquie sovitique, Yan Patocka tudie cette naissance et la sortie de la mythologie [23]. Ë lĠpoque mythologique, une scne initiale semble se reproduire dans de nombreuses traditions. Un homme mortel (Promthe, Gilgamesh) voulant acqurir lĠimmortalit fait irruption dans la sphre des dieux immortels. Il est chti, et son chtiment marque lĠajointement dfinitif qui va sparer les rgnes des mortels et des immortels. Les hommes mortels se reproduisent, se font la guerre, pratiquent lĠagriculture, le commerce, etc., et servent les dieux immortels. Le drame initial a dfini ce cadre dfinitif : la vie humaine est limite, provisoire, et la vie des dieux est dfinie par lĠimmortalit.
La philosophie va inverser lĠordre du mythe. Ce nĠest plus lĠhomme qui veut acqurir lĠimmortalit, mais son me. Elle a accs au lieu divin des ides par o elle peut vouloir un monde de justice et de vrit. CĠest ce que Socrate appelle, dans son Apologie, le Ç souci È ou le Ç soin de lĠme È. Soin que Yan Patocka considre comme tant au fondement de lĠEurope.
Malgr lĠextrme grandeur de cette pense, le dualisme qui lĠaccompagne - sparation de lĠ^me et du corps - sĠapparente, mme sĠil en est relativement diffrent, dĠanciennes doctrines orientales dvoiles par Claude Tresmontant dans son tude sur la notion dĠme [24]. LĠauteur prsente ces doctrines du dualisme de lĠme et du corps travers des traditions antiques : Upanishad, Orphisme, Pythagore, Empdocle, Platon, lĠhermtisme, la gnose, le manichisme et Plotin. Quelle en est la scne commune ? LĠme dĠessence divine chute, par ncessit cosmique ou par faute, dans un corps organis selon les ncessits de la matire. Le compos dĠme et de corps quĠest lĠhomme devra alors, dans un processus de conversion, se dissocier, sparer les deux substances en lui, se tourner vers lĠme divine ou idelle. Les atomistes pensent lĠinverse que tout est corporel, que lĠme vient dĠun compos de la matire. Mais Tresmontant note que ces doctrines de lĠassociation et de la dissociation des lments physiques comme celles de la descente de lĠme dans un corps rendent impossible une pense de la cration au sens ou la Bible en parle. Seul, dans lĠhistoire de la philosophie, Bergson parle de la cration. Comme la venue dĠune nouveaut. Pour le reste de la tradition philosophique, le monde nĠest pas cr et lĠhomme nĠest pas une crature. Ajoutons que le matrialisme comme lĠidalisme ne pensent pas la naissance. Tous ces thmes, cration, crature, naissance, viennent en fait de la Bible qui enseigne aussi la pense de la rsurrection des morts.
La philosophie, la mort et la tragdie
Au moment de la mort, nous enseigne Platon, lĠme, mais ce moment-l seulement, devient nos, esprit, et elle parvient enfin la contemplation, la theoria. La mort devrait alors nous dgager de tout lĠmotionnel, de toute la sensibilit de cette vie, o lĠme nĠest pas encore lĠesprit. Et pourtant lĠmotion est prsente. Emmanuel Lvinas dit que cette irrductibilit de lĠmotionnel se manifeste particulirement dans le Phdon. Cet excs de lĠmotion et des larmes nĠouvre cependant pas sur lĠtre dans sa connexion avec le nant. Nulle intentionnalit ici. Lvinas poursuit le dbat avec Husserl et Heidegger : Ç Si lĠmotion nĠest pas enracine dans lĠangoisse, le sens ontologique de lĠmotion est remis en question et, au-del, le rle de lĠintentionnalit. Il nĠest peut-tre pas ncessaire de soutenir que lĠintentionnalit est lĠultime secret du psychisme. Le temps nĠest pas la limitation de lĠtre mais sa relation avec lĠinfini. La mort nĠest pas anantissement mais question ncessaire pour que cette relation avec lĠinfini ou temps se produise. È [25]
La philosophie depuis son commencement est en qute de la vrit de lĠtre. Cette poque est aussi celle de la naissance de la tragdie avec Sophocle et Euripide. Que nous enseigne la tragdie grecque sur la question de la mort ?
Le deuil et la tragdie : lĠtre-pour-la-mort
Ç Nulle part, ni dans les choses, ni dans les gens, ni dans les calculs, lĠtre ne se dit, ni ne se prsente : deuil È [26]. Ce deuil, Jean Zacklad lĠvoque dans les termes de la tragdie : Ç puisez jusquĠ la lie lĠaventure tragique È. Ici rsonne le sens du mot Ç tragdie È en allemand : Trauer-spiel = le jeu du deuil. Quel lien y a-t-il entre lĠaventure tragique et la mort inluctable ? Jean Beaufret, dans un trs beau texte Hlderlin et Sophocle [27], explore ce sens du tragique ou du deuil : Ç L'vnement le plus essentiel de lĠhistoire du rapport du divin et de lĠhumain est, dit Hlderlin dans lĠlgie Pain et Vin, que le Pre a dtourn des hommes son visage. Sans doute il continue vivre et oeuvrer sans fin, mais par-dessus nos ttes, l-haut, dans un monde tout autre. La tche la plus propre de lĠhomme, celle qui lui est confie en service et en souci est ds lors dĠapprendre endurer ce dfaut de Dieu qui est la figure la plus essentielle de sa prsence. Savoir faire sienne une telle tche, cĠest entrer dans la dimension la plus propre du tragique et de la tragdie (Trauer-spiel). CĠest en effet partir de ce dtournement catgorique du divin que le deuil (das Trauern) commena de rgner sur la terre... È La tragdie serait donc lĠexploration dĠun monde dsert par le divin.
Les mots hbraques du souffle et de la vie
Le mot Ç vie È (ham en hbreu) qui apparat la premire fois dans le second rcit de la cration de lĠhomme, au second chapitre de la Gense, est immdiatement en relation avec deux mots qui disent le souffle : Ç LĠternel (YHWH)-Dieu (LOHIM) faonna lĠhomme, poussire extraite de la terre, il fit pntrer dans ses narines un souffle (nechama) de vie, et lĠhomme devint un(e) devint un(e)animal/individualit/me vivant(e) (nefesh haya). (Gn 2, 7) È
Plus loin un autre mot qui dit le souffle est li encore la vie : Ç Et moi, je vais amener sur la terre le dluge des eaux pour dtruire toute chair (bassar) qui a en elle un souffle/esprit (rouah) de vie. (Gn 6, 17) È Ce mot, ruah, apparaissait dj au tout dbut du texte biblique : Et le souffle/esprit (rouah) de Dieu (LOHIM) planait sur la face des eaux (Gn 1, 2). On le retrouve encore comme source dĠinspiration de la parole prophtique chez zchiel : Ç A cette vue, je tombai sur ma face, et jĠentendis une voix qui me parlait. Elle me dit : Fils de lĠhomme, dresse-toi sur tes pieds, que je te parle. Et un souffle/esprit (rouah) vint en moi lorsquĠelle mĠeut parl et me dressa debout sur mes pieds, et jĠentendis celui qui sĠentretenait avec moi. Il me dit : Fils de lĠhomme, je tĠenvoie vers les enfants dĠIsralÉ (Ez 1, 28 et 2, 1-3) È
Nous voyons ainsi quĠen hbreu trois mots disent le souffle et sont associs la vie : ROUAH - NEFESH - NECHAMA :
NEFESH (substantif masculin et/ou fminin), du verbe NFSH : reprendre haleine, respirer aprs le travail, se reposer
ROUAH (substantif fminin), du verbe RIAH : aspirer, respirer, sentir, reprendre ses esprits
NECHAMA (substantif fminin), du verbe NCHM : souffler, respirer, haleter
Les traductions inspires par le dualisme mtaphysique ont dessin une conceptualit qui de faon gnrale oblitre le sens hbraque originel :
NEFESH (hbreu) / PSUKE (grec) / ANIMA (latin) / ċME (franais)
ROUAH (hbreu) / PNEUMA et NOóS (grec) / SPIRITUS (latin) / ESPRIT (franais)
NECHAMA (hbreu) / PNO (grec) / SPIRACULUM, HABITUS, SPIRITUS (latin) / ċME (franais)
La question de lĠme et de lĠesprit
LĠanthropologie hbraque ne se laisse pas dire dans les termes du dualisme grec de lĠme et du corps, ou encore de lĠesprit et de la matire. Nous voyons que deux mots ont t traduits par Ç me È : nefesh et nechama. Le mot rouah (traduit en franais par Ç esprit È) a donn deux mots en grec : pneuma et nos. Le pneuma serait plus proche de la signification hbraque qui voque le souffle par o advient la parole, alors que dans lĠavance de la pense occidentale cĠest le nos qui a t retenu, dans le sens o Platon, dans le Phdon, explique quĠau moment de la mort, lĠme se fait esprit et accde la thorie, la clart contemplative, la vrit de lĠtre.
Cette identification de lĠme et de lĠesprit sĠest affirme plus tard dans lĠhistoire de lĠOccident. Lors du Concile de Constantinople, en 869, lĠEglise avait identifi lĠme et lĠesprit. Plus tard, Descartes poursuivra ce chemin en mettant en avant le mot mens. AujourdĠhui le dveloppement des neurosciences sĠinscrit dans un processus semblable. Mais dj, depuis longtemps, depuis le XVIIIme sicle, on nĠentendait plus le mot Ç me È dans le mot psuk qui a donn Ç psychologie È dĠo lĠme semble avoir disparu.
QuĠest-ce que lĠme ? Nous lisons par exemple ces rflexions de Proclus propos du Premier Alcibiade de Platon : Ç Le fait que ceux qui rpondent disent tout ce quĠils disent en le tirant dĠeux-mmes est une forte preuve en faveur de ce dogme que les mes mettent au jour les raisons partir de leur propre fond, quĠelles nĠavaient besoin que dĠun veilleur, et quĠelles ne sont pas des tablettes non crites qui reoivent leur empreinte de lĠextrieurÉ È [28].
Alcibiade nĠest pas ainsi une tablette vierge et anonyme, il doit rpondre prsent celui qui lĠveille. Lorsque son me dit Ç oui È son veilleur, Alcibiade se fait ici sujet dans sa rponse. LĠme est ce qui dit Ç oui È [29]. LĠme aurait-elle, mme chez Platon, une autre dimension que la fusion dans lĠesprit contemplatif ?Une dimension qui ressemble au Ç Hineni È (Me voici !) dĠAbraham (Gn 22, 1) ?
Cette extrme subjectivation qui fait de celui qui rpond un tre unique, que lĠon entend encore dans les religions qui parlent du Ç salut de lĠme È, ou dans le Ç Me voici !È abrahamique, sĠefface dans lĠidentification de lĠme et de lĠesprit (au sens du nos), dans le mens qui donne le Ç mental È, et dans la dominante contemporaine de la psychologie et des neurosciences. Mais si lĠme est ce sujet unique qui rpond Ç oui È, elle ne sĠidentifie plus lĠesprit contemplatif et thorique dans sa gnralit. La rponse lĠveilleur est une acceptation, dans la vie, par la personne tout entire, dans sa singularit.
Quelle pense de la vie, de la cration, de la naissance, sĠouvre alors nous, qui ne soit plus la vie de lĠesprit ou la vie biologique ? Nous nous approchons dĠune pense de lĠunicit de la crature, dĠune pense de la nouveaut.
Une individualit vivante / un souffle qui parle
Le texte de la Bible nous enseigne : Ç LĠternel (YHWH)-Dieu (LOHIM) faonna lĠhomme, poussire extraite de la terre, il fit pntrer dans ses narines un souffle (nechama) de vie, et lĠhomme devint un(e) animal/individualit/me vivant(e) (nefesh haya). (Gn 2, 7) È LĠhomme nĠest pas fait de terre ou de la matire mme du sol, mais comme le dit trs explicitement le texte biblique, de poussire dtache ou extraite du sol. Paul Nothomb fait remarquer que, dans le texte de la Gense, ce sont les animaux qui sont faits de terre (Gn 2, 19) et non pas lĠhomme [30]. La diffrence, dit-il, entre la poussire et la terre, est que cette dernire est compacte et obscure alors que la poussire laisse passer la lumire. LĠhomme serait ainsi form de poussire, de lumire et de souffle. Il est Ç un souffle qui parle È (rouah memalela), selon la traduction classique aramenne par le proslyte Onkelos, de lĠexpression Ç une personne/individualit/me vivante È (nefesh haya).
La rouah lie ici la parole montre bien sa diffrence avec le nos grec, lĠesprit contemplatif oppos la matire, qui nĠinclut pas cette dimension de la parole. La rouah (esprit/ souffle/ parole) est ce qui inspire le prophte, comme en tmoigne Ezchiel : Ç Et un souffle/esprit (rouah) vint en moi lorsquĠelle mĠeut parl et me dressa debout sur mes pieds, et jĠentendis celui qui sĠentretenait avec moi. Il me dit : Fils de lĠhomme, je tĠenvoie vers les enfants dĠIsralÉ È (Ez 1, 28 et 2, 1-3). Loin de lĠabattement de la mort, la parole dresse sur les pieds, permet de se tenir debout. LĠhomme (adam) est ce compos de poussire et de souffle qui sĠincarne dans la chair (nefesh ou bassar). Il est, ce titre, un Ç souffle qui parle È.
Le souffle et la parole : les lettres du nom divin
QuĠest-ce que la parole ? Le texte biblique nomme la rvlation de faon tout fait nigmatique : Ç Et tout le peuple assembl voi-ent les voix È (Ex 20, 15). Cette vision paradoxale o lĠon voit ce que normalement lĠon entend est dite au pluriel. LĠexprience est collective et absolument singulire la fois. LĠUn nĠenglobe pas le rel comme une totalit. Il se dit dans les singularits. Comme chaque fois une nouveaut. Un singulier pluriel. La vision des voix voque la structure de lĠcriture hbraque o les voyelles ne sont pas des lettres. Les voyelles invisibles sont le souffle du texte par o il advient la lecture et lĠcriture. La tradition a fix un usage des voyelles dans la lecture liturgique. Mais dĠautres lectures sont possibles, celles qui suscitent lĠinfinit des commentaires. Oralit, comme possibilit dĠcrire de nouveaux textes.
Quelles sont ces voix ou ces voyelles ? Commentant la rvlation du Nom divin Mose (Ex 3, 14-15), Elie Munk crit : Ç Les lettres du Ttragramme, yod, h et vav ainsi que la lettre aleph sont des consonnes vocaliques qui rendent possible la parole et servent de signes phontiques toutes les consonnes ; celles-ci ne peuvent tre articules sans quĠelles soient associes lĠune dĠentre elles, puisque les voyelles leur sont subordonnesÉ En outre, ajoute Ibn Ezra, les quatre lettres aleph-h-yod-h et h-vav-yod sont formes de sons aspirs et elles ne sĠarticulent que dans un souffle. Elles ne sont quĠune haleine et elles reprsentent ainsi le caractre immatriel des forces initiales qui furent lĠorigine de la cration et de lĠexistence. Ces noms nous mnent ainsi jusquĠaux sources mmes de la vie È [31]. Juda Halevi [32] crivait galement : Ç Le sens cach de ce nom (le Nom Ttragramme) nous chappe ; quant aux lettres qui le composent, elles ont la proprit dĠtre vocaliques. Or ce sont les lettres vocaliques aleph, h, vav et yod qui dterminent la prononciation de toutes les consonnes ; puisquĠon ne peut prononcer aucune consonne sans la prsence des lettres vocaliques. È [33]
Les auteurs cits disent que les voyelles qui rendent possible la prononciation des consonnes - et donc la parole - sont la source de la vie. LĠhomme serait alors essentiellement dfini par la parole. Une vie humaine ne serait pas biologique au sens animal ni spirituelle au sens de la contemplation muette. Mais une vie ancre dans la parole. Une parole dans la chair. Un Ç souffle qui parle È.
Il est important de noter que lĠinvocation de Dieu, en tant quĠil est celui qui ressuscite les morts, est intgre prcisment dans la liturgie lĠpoque que nous avons dcrite, celle de la naissance de la philosophie et de la tragdie en Grce. poque o, dans lĠloignement du divin et le dveloppement de lĠhumanisme, la mort devient un thme central : la philosophie comme apprentissage de la mort, la tragdie comme exprience, dans la mort, du dtournement des dieux.
Discours, invocation, prire, la parole qui vient nos lvres puis sa force dans le prophtisme. Lvinas crit : Ç Le prophtisme serait ainsi le psychisme mme de lĠme, lĠAutre dans le Mme, o le dans signifie le rveil du Mme par lĠAutre. Sans que lĠInfini soit prsent ! Il est arrire-pense trop haute pour se pousser au premier rang ou au rang de thme. Dans la phrase premire o Dieu est tmoign - dans le me voici - Dieu nĠest pas nonc [É] LĠobissance qui prcde lĠcoute de lĠautre est anachronisme de lĠinspiration [É] Elle est singulire obissance lĠordre de se rendre avant de lĠentendre. Cette allgeance avant tout serment est lĠAutre dans le Mme, cĠest--dire le temps, le se passer de lĠInfini ! È [34]
Si le psychisme est habit par lĠAutre, nous sommes dans une exprience du discontinu, dĠun temps non homogne. Comme si la parole (notre incarnation) nĠadvenait que dans cette diffrence. La personne humaine ne serait pas ainsi dfinie par la prsence soi du cogito, et le temps ne signifierait pas dans la dure. La vie nĠest pas le remplissage du vcu. Lvinas analyse ce discontinu comme passage au temps de lĠAutre. Dans ses descriptions phnomnologiques sur la caresse, la relation du pre au fils, la fcondit, il dit que Ç la rsurrection constitue lĠvnement principal du temps È, et que le messianisme est le passage Ç du perptuel lĠternel È [35].
Qui ressuscite ? Que nous apprend la rsurrection sur la naissance ?
En hbreu ressusciter se dit qoum, et en grec anastasis : les deux mot voulant dire Ç se lever È. CĠest pourquoi il est question dans les textes bibliques, Ancien et Nouveau Testament, du fait de se relever dĠentre les morts. Nous remarquons que la Bible parle de relvement et de rsurrection des Ç morts È. Il nĠest pas question dans ces textes de rsurrection des corps. Cette prcision nous met nouveau en dehors des concepts dualistes. Si lĠhomme nĠest ni me ni corps, qui alors ressuscite ?
Le texte biblique (Ancien et Nouveau Testament) parle de la rsurrection des morts ou de la rsurrection dĠentre les morts. En effet, lĠanthropologie biblique ne connat pas de corps distinct de lĠme. Il nĠy a pas de dichotomie entre le corps et lĠme. La question de savoir si les morts ressusciteront avec leurs corps nĠa pas de sens du point de vue biblique, puisque cette tradition est trangre au dualisme issu de la philosophie. Qui ressuscite ? demande Claude Tresmontant [36]. La rponse est simple : Ç CĠest lĠhomme ! È, dit-il, en tant quĠil nĠest ni une me, ni un corps.
Le processus dĠextrme subjectivation par lequel lĠme (la personne) rpond Ç oui È son veilleur, ou Ç Me Voici ! È (Hineni) comme Abraham, nĠest pas une persistance dans son tre mais une relation lĠInfini [37].
Ainsi la rsurrection nĠest pas lie une perptuation de soi-mme, mais au jugement des traces laisses par nos actions dans le monde. Aprs quoi se dessine la question dĠun monde venir. Dont la pointe avance dans ce monde-ci indique le sens moral de notre destination finale. Messianisme au sens o Sartre en parlait.
Le texte talmudique nous dit que celui qui ne croit pas la rsurrection des morts nĠa pas part au monde venir. Par extension, cette croyance se nomme Isral. La mort ainsi nĠest pas lĠanantissement du sujet, mais dans les termes de Lvinas, elle est la question ncessaire pour que la relation avec lĠInfini se produise. Vie sans mort. LĠautre dans le mme. Extrme et paradoxale subjectivation. Vie de lĠInfini.
En conclusion,
Nous avons un pre et une mre ; Paternit et Maternit en Dieu
Le nom Ç Dieu È traduit lĠhbreu lohim qui dsigne la rigueur et le jugement. CĠest sous ce nom que se fait la justice comme une rtribution. Le nom Ç YHWH È, traduit par Ç ternel È ou Ç Seigneur È, dsigne la misricorde ou plus exactement la matricialit, la tendresse maternelle des entrailles, selon la traduction dĠHenri Meschonnic. Le Nom Ttragramme est lui-mme tout un champ familial : le pre (Y), la mre (H), le fils (W), la fille (H). Il advient dans la colonne centrale des sphirot, appele Ç rahmanut È que lĠon aurait tort de traduire par Ç misricorde È, puisquĠil y a le mot Ç rehem È qui dit la matrice, lĠutrus. QuĠest-ce que la maternit en Dieu ?
Nous avons vu que le fait de natre dĠune femme fait sortir des impasses rvolutionnaires de la fraternit, du groupe en fusion et du meurtre du pre. Les impasses occidentales sont donnes autour de la geste dĠÎdipe : meurtre du pre, coucher avec sa mre, abolition de lĠordre des gnrations. Retour gnostique lĠorigine.
LĠenfant est le dvoilement de la paternit et de la maternit de ses gniteurs. Paternit et maternit qui prennent leur source en Dieu. Mais le but, la vocation humaine nĠest pas de revenir lĠorigine comme dans les gnoses. Cronos ne mangera pas ses enfants, le fils ne couchera pas avec sa mre comme Îdipe. Penser la paternit et la maternit, cĠest penser la naissance avec la cration, cĠest penser la naissance avec la rsurrection des morts. Penser dans la dimension duelle du masculin et du fminin, ce nĠest pas penser le neutre ou lĠandrogyne. Si le paysage tragique, lĠaube du monde moderne, annonce que Le Pre a dtourn des hommes son visage, le retour vers Dieu comme Pre est, selon Bernard Dupuy, lĠenjeu du christianisme dans un partage avec le judasme.
La mre est le premier passage au temps de lĠautre. Elle est la sortie du pur prsent, sortie de lĠidentit, exprience de lĠaltrit en soi. LĠamour vient comme lĠaltrit, comme la temporalit. Elle est le lieu (maqom en hbreu est aussi un nom de Dieu). En effet, la tradition nous apprend que le monde nĠest pas le lieu de Dieu, mais que Dieu est le lieu du monde. Localisation, extrme subjectivation, fminit. Cette localisation est aussi la temporalit, le Ç se-passer de lĠInfini È, selon Lvinas. CĠest le Ç Me voici ! È dĠAbraham, de dimension fminine, qui est lĠautre face de la Gloire de lĠInfini.
Le Pre uni la Mre - le pre matriciant, selon Benny Lvy - nous renvoie la concrtude de lĠexistence protectrice des parents.
La mre amnage lĠaccueil, la demeure pour la parole du pre qui vient dĠailleurs. Parole qui est comme une semence. Alors Ç Chac-un - dit Benny Lvy [38] - est arrach aux paysages, trangis par la parole venue du dehors, paternelle, est rvl soi-mme, son unicit, par la parole fminine, habitant en celui qui lĠaccueille. È
Nous sommes un Tout dĠUniques. La cration en est transfigure.
Les femmes, la maternit, et lĠenfantement du Messie
Les femmes orientent lĠhistoire dans le sens de la promesse. CĠest pourquoi Ç Histoire È se dit en hbreu : Ç TOLEDOT È, cĠest--dire engendrements. Ruth est lĠaeule de David, le Roi- messie, Hanna enfante le prophte Samuel qui donne lĠonction David. La Reine Esther est celle qui sauve. Reine portant la messianit.
Ruth1, 1-22 ; I Samuel 2, 1-10 ; Esther, 5
Histoire de pauvret. Naomi et Ruth reviennent, indigentes, en Isral. Ruth avait dit : Ç Partout o tu iras, jĠirai, o tu demeureras, je veux demeurer, ton peuple sera mon peuple et ton Dieu sera mon Dieu. È
Ses gestes
sont les gestes
du Bien
Elle oriente lĠhistoire
Elle, mre
du Messie
Sa signature,
en bas dĠun rcit
crit au fminin
Etait-elle belle ?
Un geste suffit pour orienter le monde
Chemins tranges de la maternit
Elle rencontre Boaz pour enfanter le Messie
LĠenfant de Ruth est lĠenfant de Naomi
Transmission de femme femme
Nous ne saurons rien
du secret de sa couche,
sauf
quĠune prsence divine
veille
la venue du Messie
FÏtus enroul comme la Torah
Histoire-Rouleau
Le Nom divin y est inscrit
Le Messie advient
dans la pudeur dĠun geste,
Signature ordonne
pour lĠcriture dĠun nom
Aussi courte sa nuit
quĠune vie
entire
(jĠaspire son silence,
ses gestes clairs)
Sa parole qui nomme le Matre du monde
Hanna,
toute prire dcoule de toi
de ta posture
debout
plus grande que les anges
Murmurant,
dans lĠcho
entre
Je, Tu et Il,
lĠinscription de lĠIndicible
Dans la joie de la maternit
Tu nommes
la puissance et le jugement de Dieu
Vie irradie
Ç Et Esther trouva grce È
Elle ouvre le monde la modernit
invisible
(monde qui se croyait sans Dieu)
Elle restaure
lĠAlliance antique
Ç Et Esther trouva grce È
Son nom,
sa signature,
sont inscrits
dans le Livre
Comme elle lĠa voulu
[1]Rabbi Schlomo ben Itzhak HaTsarfati (Rabbi Salomon fils dĠIsaac le Franais), dit Rachi (Troyes, c. 1040 - 16 juillet 1105). Rabbin, exgte, lgiste, dcisionnaire, pote et vigneron champenois. Illustre commentateur de la Bible et du Talmud de Babylone. Grande autorit rabbinique. Son exgse biblique a aussi influenc, par le truchement de Nicolas de Lyre, la traduction de la Bible par Martin Luther.
Les commentaires de Rachi cits dans cette tude se rapportent aux versets de la Bible ou aux pages du Talmud.
Le Pentateuque en cinq volumes suivis des Haphtaroth avec Targoum Onqelos, accompagn du commentaire de Rachi. Traduit en franais par M. Joseph Bloch, M. Isral Salzer, M. Elie Munk, M. Ernest Gugenheim. La traduction franaise du Pentateuque est celle du Rabbinat franais adapte au Commentaire de Rachi. Paris, Fondation Samuel et Odette Lvy, 1978-1979
[2] Les citations et plusieurs commentaires sont extraits du livre : Catherine Chalier, Les matriarches. Prface dĠEmmanuel Lvinas. ditions du Cerf, 1985
[3] Catherine Chalier, Les Matriarches. Op. cit. (p. 38)
[4] Jean Dujardin, LĠglise et le peuple juif, Calmann-Lvy, 2003 (page 492)
[5] Dominique Aubier, Rponse Hitler ou/et la Mission juive : la circoncision. ditions Le Qorban, (s.d.)
[6] La cabale sfirotique ou thosophique nomme les dix manations travers lesquelles se voile et se manifeste en mme temps la Divinit. Elles sont un pont reliant lĠInfini et notre monde. Appeles Ç Arbre de vie È, elles sont lies des parties du corps humain et reprsentent en mme temps ce que Charles Mopsik appelle Ç le psychisme divin È (La Cabale, Jacques Grancher, 1988)
On compte parmi les grandes Ïuvres de la cabale sfirotique : Le Sepher Yetsirah et le Zohar.
[7]Catherine Chalier, Les Matriarches. Op. cit. (p. 43-44)
[8] LĠÏuvre de Claude Tresmontant est trs clairante ce propos : lĠanthropologie biblique ne sĠinscrit pas dans le dualisme de lĠme et du corps ou de lĠesprit et de la matire. Voir particulirement : C.Tresmontant, Le problme de lĠme. ditions du Seuil, 1971. Voir galement infra le chapitre : Ç La vie dans lĠhorizon de la cration et de la naissance È.
[9] Catherine Chalier, Les Matriarches. Op. cit. (p. 48).
[10] Emmanuel Lvinas, thique et Infini. Livre de Poche, 1982 (p. 62)
[11] Emmanuel Lvinas, thique et Infini. Op. cit. (p. 55 et 63 : Ç LĠamour et la filiation È)
[12]Emmanuel Lvinas, Totalit et Infini. Essai sur lĠextriorit. (1961) Matinus Nijhoff, 1980 (fcondit p.244 ; transcendance et fcondit p.251 ; filialit et fraternit p.255)
[13] Emmanuel Lvinas, Totalit et Infini. Op. cit. (p. 254)
[14] Catherine Chalier, Les Matriarches. Op. cit. (p.55)
[15] Dans le monde sfirotique de la cabale thosophique, la parole prophtique est lie aux sfirot Netsah (ct droit, masculin, cuisse ou hanche droite) et Hod (ct fminin, cuisse ou hanche gauche), sphres de la sexualit (Voir : Rabbi Mose Cordovro (1522-1570), Le Palmier de Dbora, ditions Verdier, 1985)
[16] Emmanuel Lvinas, Autrement quĠtre ou au-del de lĠessence (1974). Le livre de poche, 2004 (p. 233)
[17] Catherine Chalier, Les Matriarches. Op. cit. (p. 81)
Le midrach dit aussi quĠIsaac a apport la maladie et Jacob lĠpreuve. Ë propos de la vieillesse, voir aussi les analyses de Lvinas sur le visage et la peau rides. LĠhomme, dit-il, est un tre qui vieillit dans le monde.
[18] Catherine Chalier, Les Matriarches. Op. cit. (pp. 221-222)
[19] Emmanuel Lvinas, Difficile libert. Albin Michel, 1976 (p. 117)
[20] Voir Gille Hanus, LĠun et lĠuniversel. ditions Verdier, 2007 (pp. 43-46 p. 44)
Voir galement : Jean-Paul Sartre et Benny Lvy, LĠespoir maintenant. Les entretiens de 1980. ditions Verdier, 1991, p 47 et 57. Benny Lvy, Le meurtre du Pasteur.Critique de la vision politique du monde. ditions Grasset et Verdier, 2003 (p 65). Benny Lvy, La crmonie de la naissance. ditions Verdier, 2005 (pp. 78-82)
[21] Gilles Hanus, LĠun lĠuniversel, op cit p. 45
[22] Bernard Dupuy, Ç Heidegger et le Dieu inconnu È, dans Heidegger et la question de Dieu. Grasset, 1980 (p. 110 et sq.)
[23] Yan Patocka, Platon et lĠEurope. ditions Verdier, 1973
[24] Claude Tresmontant, Le problme de lĠme. ditions du Seuil, 1971
[25] Emmanuel Lvinas, Dieu, la Mort et le Temps. Editions Grasset et Fasquelle, 1993, pp. 27-28
[26] Jean Zacklad, Pour une Ethique. Livre III. LĠAlliance. Textes et Travaux, 1985
[27] Jean Beaufret, Hlderlin et Sophocle. ditions Grard Montfort, 1983
[28] Proclus, Sur le Premier Alcibiade de Platon. ditions des Belles Lettres. Voir lĠtude de Benny Lvy, Etre juif. ditions Verdier, 2003
[29] Voir les analyses de Benny Lvy sur Platon, dans Le meurtre du Pasteur. Critique de la vision politique du monde. ditions Grasset et Verdier, 2002
[30] Paul Nothomb, LĠimagination captive : Essai sur lĠhomme immortel. ditions de la Diffrence, 1994
[31] lie Munk, La voix de la Thora. Fondation S. et O. Lvy, 1981
[32] Juda Hallevi (1086-aprs 1140), Le Livre du Kuzari. Traduit de lĠarabe avec un avant-propos et des notes par M. Ventura. Librairie philosophique J.Vrin, 1987
[33] A propos du Nom divin, le Ttragramme, nous pouvons noter que selon la tradition juive et hbraque, ce nom connu par Adam dans le jardin dĠEden aurait t oubli lorsque lĠhumanit serait devenue idoltre. Il est rvl nouveau Mose lors de lĠpisode du buisson ardent (Exode 3,14). Deux Noms lui sont rvls : HI (Je serai) et YHWH (le Ttragramme imprononable) ; et ces deux noms comportent lĠensemble des consonnes vocaliques, cĠest--dire des voyelles. Il nĠy a pas l de mystre, car les voyelles sont communes toutes les langues. La puissance de vie de ce nom serait la fin de toute idoltrie et la source de notre vie ainsi que de lĠexigence dans notre effort de parole. CĠest ce quĠcrit Mamonide dans le livre I du Guide des gars (chap. 60 et sq). Les textes, en particulier la prophtie de Zacharie, disent que ce nom est en rserve pour toute lĠhumanit.
Le Nom Ttragramme est compos de quatre lettres qui sont des consonnes vocaliques ou matres lectionis : parfois voyelles et parfois consonnes. Leur assemblage dans le nom divin les rend inarticulables entre elles. Dans la tradition juive, ce nom sĠcrit et ne se prononce pas. Quand on veut simplement en parler, par exemple au cours dĠune tude biblique, on dit HaChem (le Nom).LorsquĠil faut lĠnoncer ou lĠinvoquer, lors de la liturgie (prire ou lecture de versets bibliques), il est remplac par un nom substitut : Adona (mon Seigneur). CĠest ce nom substitut qui apparat dans les traductions : Kurios, Dominus, Seigneur, ternel, Lord, etc
[34] Emmanuel Lvinas, Dieu, la Mort et le Temps. Op.cit.( pp. 229-230)
[35] Emmanuel Lvinas, Totalit et Infini. Op. cit. (p 261)
[36] Claude Tresmontant, La mtaphysique du christianisme et la naissance de la philosophie chrtienne. ditions du Seuil, 1961(pp. 615 et sq.)
[37] Emmanuel Lvinas critique vivement Spinoza parce que la persvrance dans lĠtre dont parle lĠauteur de lĠthique ignore la dimension de lĠaltrit, le temps comme passage au temps de lĠAutre. Mais ne pourrait-on entendre, positivement, dans ce passage du perptuel lĠternel dont parle Lvinas, un cho de ces paroles de Spinoza : Ç Nous sentons et nous exprimentons que nous sommes ternels. È (thique, livre V, scolie de la proposition XXIII)
[38] Benny Lvy, Visage continu. La pense du retour chez Emmanuel Lvinas. ditions Verdier, 1998 (pp. 112-113)
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Mise à jour : 14 janvier 2013